Mon interview pour ELLE.fr concernant la thérapie de couple
J'ai l'honneur de vous transmettre par le biais de cet article de blog, l'article du magazine ELLE.fr, rédigé par la journaliste Caroline MICHEL.
Un grand merci à cette professionnelle pour son professionalisme et sa bienveillance.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la thérapie de couple
À quel moment est-il judicieux de se lancer dans une thérapie de couple ? Comment se déroulent les séances ? Que peut-on en attendre ? On en parle avec les thérapeutes de couple Amélie Archen et Sébastien Campana.
« Il vaut mieux prévenir que guérir », nous dit l’adage. Seulement, si on assume de plus en plus d’aller « voir quelqu’un » à titre personnel – notamment parce que de nombreuses thérapies brèves séduisent de par leurs outils concrets –, la thérapie de couple est souvent envisagée comme une solution de dernier recours. C’est en tout cas le constat de la sexothérapeute et thérapeute de couple Amélie Archen, installée à Bordeaux : « Ce n’est pas une démarche facile, notamment parce qu’elle coûte du temps et de l’argent. Voilà pourquoi certains couples attendent d’être au bord du précipice avant de consulter. » La thérapie de couple a beau être perçue comme « la thérapie de la dernière chance », les couples qui se lancent veulent généralement réparer leurs erreurs, s’entendre à nouveau, ou, le cas d’échéant, « rompre proprement ». Mais n’allons pas croire que les thérapies de couple entrainent ou supervisent une séparation : comme les thérapies individuelles, elles ont pour objectif d’autonomiser les partenaires pour qu’ils trouvent les ressources nécessaires à leur épanouissement et les réponses à leurs questions. Il n’est donc jamais trop tôt ou trop tard pour se lancer : l’essentiel est d’oser franchir la porte d’un cabinet quand on estime que le bon moment est venu. Alors ouvrons cette porte ensemble pour découvrir comment s’enclenche et se déroule une thérapie de couple.
« Sur le papier, beaucoup de motifs conduisent les couples chez un thérapeute dédié : l’infidélité, l’absence de désir sexuel, la jalousie, le souhait de rompre… », remarque Amélie Archen. Tous ces motifs sont valables ; le plus important est de solliciter un thérapeute lorsque l’on sent que certains problèmes inextricables habitent notre relation. Lorsqu’on a mal au ventre depuis une semaine et que l’automédication n’y fait rien, on appelle le médecin. La même logique s’applique à la thérapie de couple : dès lors que quelque chose « ne va pas » et que nos tentatives de résolutions n’offrent aucun résultat, appeler un thérapeute de couple peut s’avérer très utile.
Mais il arrive que l’on passe des années à nier ou supporter des problèmes de couple sans réagir. Le principal élément déclencheur pour enfin demander de l’aide est généralement l’absence de communication. « Lorsque la communication ne passe plus, les couples prennent la décision d’entamer une thérapie », précise Sébastien Campana, coach et thérapeute de couple à Rennes en collaboration avec Cécile Michel, thérapeute aussi. En effet, les soucis de communication demeurent la partie visible de l’iceberg, et c’est notamment grâce à eux que l’on prend conscience de la nécessité de consulter : « Tant que la communication est établie, et même si elle est parfois dysfonctionnelle – des disputes émergent, un partenaire a l’ascendant sur l’autre… –, le couple n’a pas forcément besoin de consulter », poursuit Sébastien Campana. Mais quand la communication est rompue ou vaine, le couple est désarmé et ne parvient plus à s’en sortir seul. Voilà en quoi le thérapeute de couple est un interlocuteur de choix : depuis sa position neutre, son rôle sera de rétablir le lien entre les partenaires.
COMMENT SE DÉROULE UNE THÉRAPIE DE COUPLE ?
Au sein de leur cabinet, Sébastien Campana et Cécile Michel mènent ensemble les thérapies de couple, et plus particulièrement la première séance : « Nous sommes présents tous les deux et abordons d’emblée les problèmes de communication. L’objectif, au départ, est que chacun des partenaires expriment ses souffrances, ses frustrations, et plus globalement ses sentiments », précise le coach. À ce moment-là, les thérapeutes rétablissent la communication ; ils sont le « câble » manquant. « Quelque part, il s’agit, en tant que tiers, de reformuler les propos des partenaires qui, parfois, s’expriment avec maladresse. On temporise, on fluidifie », explique Amélie Archen. Et parce que le cadre est sécurisant et apaisé, les deux membres du couple se confient plus aisément et s’écoutent attentivement.
L’autre point clé de la thérapie de couple consiste à définir ce que l’on veut. « Quand le couple est en crise, les partenaires savent globalement ce qu’ils ne veulent plus vivre ou subir. Mais ils ne parviennent pas à mettre des mots sur ce qu’ils désirent. Nous les aidons à trouver ces mots », développe Sébastien Campana. Rien de plus essentiel que de projeter une relation épanouissante, en accord avec nos attentes, pour pouvoir avancer dans la bonne direction. Des propos que la thérapeute Amélie Archen rejoint en précisant que s’il est primordial de relancer la communication, il ne faut pas négliger la communication positive : il est essentiel que le couple se raconte « de jolies choses ». Pour ça, la thérapeute propose toujours un jeu en fin de séance : les couples piochent une carte sur laquelle une consigne est indiquée. Elle peut intimer d’exprimer un mot d’amour à son partenaire, de se remémorer un tendre souvenir… « Tout ça contribue aussi à la réparation du lien. Parfois, les gens pleurent, ils ont oublié que leur couple existait au-delà de ses difficultés », conclut Amélie Archen.
EN SÉANCES, DES EXERCICES ET UN RYTHME ADAPTABLE
S’il existe des thérapies uniquement basées sur le dialogue – on parlera davantage de thérapies à inspiration analytique, souvent menée par un psychologue –, les thérapies de couple peuvent davantage s’inspirer du coaching en mêlant verbalisation et exercices. « Les couples qui viennent en thérapie ont besoin de concret et c’est exactement ce que nous leur apportons », précise Sébastien Campana. Ce « concret » propose au couple d’entrer en mouvement, et même au-delà des séances. On pourrait presque dire que l’on repart du cabinet avec « un programme de gymnastique conjugale ». « Si le couple, par exemple, n’est pas à l’aise à l’idée d’évoquer un souvenir tendre devant moi, je leur propose d’en discuter de retour chez eux », détaille Amélie Archen. Chez soi, on peut aussi être amené à veiller aux efforts de l’autre et apprendre à se dire merci, à s’exercer à ne plus penser à la place de son partenaire pour le laisser libre de nous surprendre, ou encore à « se faire un véritable câlin pendant au moins trente secondes », comme le recommande Sébastien Campana.
Parce que la thérapie de couple se veut ludique, Amélie Archen n’impose aucun rythme de séances. Selon la spécialiste, l’idéal est de se voir une fois toutes les deux semaines, un délai qui laisse le temps d’expérimenter des choses à la maison, mais c’est aux couples d’en décider. Quant aux séances en elles-mêmes, elles durent un peu moins d’une heure, une temporalité consciemment établie, puisqu’une durée de cinquante minutes propose d’aller à l’essentiel, de se confier sans trop de détour, et de se resserrer les échanges sur les sujets importants.
UNE THÉRAPIE DE COUPLE N’EMPÊCHE PAS DES ENTRETIENS INDIVIDUELS
Quand on débarque en thérapie de couple, on ne débarque pas seulement avec nos problèmes de couple : notre histoire fait partie du bagage. « Lors des séances, on parvient rapidement à remonter à l’origine de certains problèmes de couple, qui sont alimentés par l’histoire de chacun », relate Sébastien Campana. Un partenaire qui, par exemple, manque de confiance en lui, rencontre des difficultés à s’affirmer, flirte sans cesse avec la culpabilité ou un désir de perfection, peut, sans s’en apercevoir, entraîner quelques déséquilibres dans la relation. Mais on ne vient pas chez le thérapeute de couple pour finir sur un divan et entendre que « tout est de notre faute ». « Les deux partenaires sont responsables du couple. Alors quand l’un est fautif, l’autre l’est aussi, rappelle Amélie Archen, puisque le partenaire accueille et reçoit nos comportements avec sa propre grille de lecture. Ses réactions dépendent là aussi de son bagage, de son passé… » Comme le précise Sébastien Campana, on confond bien trop souvent « identité » et « comportements », car, spécifiquement, au sein du couple, les comportements se coconstruisent sur la base de nos identités. Et en prendre conscience, c’est réaliser que si nous ne pouvons pas toujours changer ce que nous sommes profondément, nous pouvons changer notre façon de fonctionner ensemble en apprenant à nous écouter et à considérer les failles de l’autre. Bonne nouvelle, donc : le couple n’est pas figé. « Les mêmes partenaires peuvent former un nouveau couple ! », s’exclame et rassure le coach.
Pour que cette prise de conscience s’opère, Sébastien Campana et Amélie Archen fonctionnent « aux séances individuelles », c’est-à-dire que les séances de couple sont entrecoupées, si nécessaire, de séances individuelles, ce qui peut encourager à se confier davantage et à analyser certains comportements en tête à tête avec le thérapeute. Ensuite, tout ce qui est dit est réutilisé lors des séances en duo, mais toujours avec professionnalisme – c’est bien ce que l’on vient chercher : « Le thérapeute n’est pas là pour mettre les partenaires à charge. Il n’ira jamais dire que l’un a tort et l’autre raison. Il se servira de toutes les infos qu’il obtient pour inviter les partenaires à se poser les bonnes questions », rassure Amélie Archen.
Quant aux séances familiales, qui intègrent par exemple les enfants, elles sont bien plus rares et relèvent plus exactement de l’approche du conseiller conjugal. Comme l’explique Amélie Archen, la frontière entre ces deux métiers est mince : « Le thérapeute de couple n'exerce pas auprès des enfants. Nous abordons bien évidement le système familial mais la rencontre physique avec les enfants ne se fait pas ou alors qu'à de très faibles occasions. Cela appartient plutôt au conseiller conjugal, que l’on pourrait assimiler à un médiateur familial. »
EN COMBIEN DE TEMPS LE COUPLE REMONTE-T-IL LA PENTE ?
A l’instar des thérapies brèves, comme les thérapies cognitives comportementales, l’EMDR ou l’hypnothérapie, les thérapies de couple qui se basent sur le concret permettent aux partenaires de travailler sur leurs comportements. Cela ne signifie pas que les problèmes ne sont pas analysés en profondeur ; on part simplement du principe que le passage à l’action est toute aussi intéressant que la compréhension de la situation actuelle.
Les exercices et les expériences ont pour objectif d’apporter des résultats. Voilà pourquoi une thérapie de couple ne dure pas des années. Evidemment, tout dépend des besoins et de l’évolution du couple qui peut, par ailleurs, stopper la thérapie quand tout va mieux en gardant en tête que la porte du cabinet reste ouverte. L’important, néanmoins, et de ne pas entraîner de dépendance au thérapeute, explique Amélie Archen. « Les couples doivent pouvoir évoluer sans moi, être autonomes. S’il est capital qu’ils repèrent le cabinet comme un lieu neutre, ils doivent également apprendre à s’en détacher. » Et pour que les couples prennent aisément leur envol, la thérapeute leur demande d’élire, chez eux, une pièce dédiée à la communication et aux discussions plus animées, qui « remplacera » le cabinet et ne polluera pas des pièces de la maison consacrées à la convivialité, comme le salon ou la chambre. Sébastien Campana, lui, propose de circonscrire un moment spécifique aux discussions « de fond », puisqu’un temps défini permet de cadrer l’échange et de « passer à autre chose » avec plus de facilité. En somme, l’idée est de consacrer un espace à la communication pour ne plus qu’elle se dérobe, et ce grâce à l’accompagnement du thérapeute.